• SUR LA ROUTE DE PEN-ZAC

    Les Charlots  (1968)

    Chansong 103

    Difficile de choisir entre l'interprétation du créateur, l'inénarrable Georgius, et le remake tout aussi désopilant des Charlots !   A pile ou face, sans doute, car les deux versions se valent. Et, promis, nous reviendrons plus tard sur Georgius !

    Après avoir accompagné l'élucubrant Antoine sous le nom des "Problèmes", le groupe parodique des Charlots va conquérir la  célébrité essentiellement grâce au cinéma, mais poursuivra parallèlement une carrière musicale. Jean-Guy Fechner, Jean Sarrus, Gérard Filippelli et Luis Rego sont emmenés par Gérard Rinaldi (1943-2012), chanteur et imitateur doué...

    En 1968, les Charlots sortent leur disque "Caf'Conc'" en hommage aux chansons populaires de l'entre-deux guerres. SUR LA ROUTE DE PEN-ZAC est l'évocation irrésistible d'une noce bretonne qui serait illustrée par un Dubout en folie... Notons que les Charlots ont ajouté au texte originel de Georgius quelques dialogues parlés égrillards du meilleur effet  ("Ah Jean-Louis Théodule, de c'loup on m'a dit des merveilles... - Tu verras, Maryvonne, il a de grandes oreilles !").

    Tout cela est parfaitement enlevé, totalement inoffensif, et assez irrésistible...

     

    Paroles

    (Les cloches... Midi !)
    Sur la route de Pen-zac,
    Gouz gouz la irac,
    Gouz gouz la irac,
    Sur la route de Pen-zac.
    La joie éclate et fait "crac"
    Y'a des bourgeons qui bourgeonnent.
    Les pinsons font "ricuicui"
    C'est la noce à Maryvonne
    Qui débouche du pays.

    La grand' mère souffle dans un biniou,
    Le grand père fait un pas de cheu nous,
    Les mariés suivent bras d'ssus, bras d'ssous.
    Ouh ! En soupirant et s'faisant les yeux doux.
    Ananni gouzéosur
    Ananni gouzarch'ant !


    Parlé : Ah Maryvonne J'te plais t'y...
    Meuhh !
    Et moi Jean-Louis Théodule j'te plais t'y...  Ouiii.....

    (Parlé : Deux heures)

    Sur la route de Pen-zac,
    Gouz gouz la irac,
    Gouz gouz la irac,
    Sur la route de Pen-zac,
    Pour calmer les estomacs
    A l'auberg' du "Chat en boule"
    Sous l'unique parasol.
    Voilà que le cidre coule
    Dans les verres dans les bols.

    La grand' mère souffle dans son biniou,
    Le grand père siffle un coup d'cidre doux,
    Les mariés s'approch'nt joue contre joue.
    Ouh ! Et bientôt vont se mélanger les g'noux.
    Ananni gouzéosur
    Ananni gouzarch'ant !

    (Parlé : Les cloches... Huit heures)

    Sur la route de Pen-zac,
    Gouz gouz la irac,
    Gouz gouz la irac,
    Sur la route de Pen-zac,
    Les filles vont en zig-zag.
    On danse la dérobée
    Les gars sont entreprenants
    Car la noce est imbibée
    D'une eau d'vie, vieill' de cent ans.

    La grand'mère suçotte son biniou,
    Le grand papa ronflotte et dort debout,
    Maryvonne dans l'gilet d'son époux,
    Ouh ! Soupir "C'est-y bientôt qu'j'vas vouër le loup.
    Ananni gouzéosur
    Ananni gouzarch'ant !

    (Parlé : Les cloches... Moins cinq)

    Sur la route de Pen-zac.
    Gouz gouz la irac.
    Gouz gouz la irac.
    Sur la route de Pen-zac,
    La lun' pose son bivouac
    Elle éclaire les fougères
    On voit un couple enlacé
    Et soudain, dans la nuit claire
    Monte un cri à tout casser.

    La grand'mè re laiss' tom-ber son biniou,
    Le grand pèr' se réveille et comprend tout
    L'année prochain', je vous donn' ren-dez-vous !
    Ouh ! Y aura un p'tit Breton d'plus parmi nous.
    Ananni gouzéosur
    Ananni gouza-ch'ant !


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  • CET ENFANT QUE JE T'AVAIS FAIT

    Brigitte Fontaine & Jacques Higelin  (1968)

    Chansong 102

    Ce duo mémorable figure sur le mythique album BRIGITTE FONTAINE EST... FOLLE. La musique est d'Higelin, les paroles de BF elle-même. Etrange chanson, "dialogue de sourds" dont l'insolite est magnifié par une interprétation impeccablement juste, elle même soutenue par une orchestration étonnante (ah, ces choeurs !).

    Difficile bien sûr, sans doute inutile, voire contre-productif, de commenter un texte savamment conçu pour intriguer, et qui y parvient en douceur. Fontaine et Higelin avaient déjà été cités ici (Chansongs 49 et 85) mais leur rencontre, sous l'égide du label Saravah fondé par Pierre Barouh, a quelque chose de miraculeux que je vous laisse (re)déguster sans plus m'attarder...

     

     

    Paroles

    Lui:

    Cet enfant que je t'avais fait
    Pas le premier mais le second
    Te souviens-tu?
    Où l'as-tu mis, qu'en as-tu fait
    Celui don't j'aimais tant le nom
    Te souviens-tu?

    Elle:
    Offrez-moi une cigarette
    J'aime la forme de vos mains
    Que disiez-vous?
    Caressez-moi encor' la tête
    J'ai tout mon temps jusqu'à demain
    Que disiez-vous?

    Lui:
    Mais cet enfant, où l'as-tu mis
    Tu ne fais attention à rien
    Te souviens-tu?
    Il ne fait pas chaud aujourd'hui
    L'enfant doit avoir froid ou faim
    Te souviens-tu?

    Elle:
    Vous êtes tout à fait mon type
    Vous devez être très ardent
    Que disiez-vous?
    Je crois que je n'ai plus la grippe
    Voulez-vous monter un moment
    Que disiez-vous?

    Lui:
    Mais je t'en supplie, souviens-toi
    Où as-tu mis ce bel enfant
    Te souviens-tu?
    Je l'avais fait rien que pour toi
    Ce bel enfant au corps tout blanc
    Te souviens-tu?

    Elle:
    Ah vraiment tous mes compliments
    Mais arrêtez je vous en prie
    Je n'en puis plus
    Vous êtes tout à fait charmant
    Mais ça suffit pour aujourd'hui
    Que disiez-vous?

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  • ANNE, MA SOEUR ANNE

    Louis Chedid   (1985)

    Chansong 101

    Pour situer historiquement les choses, c'est en juin 1984 que le Front National réalise une percée sérieuse en frôlant les 11% des voix aux élections européennes. La chanson de Louis Chedid, connu surtout alors comme étant le fils d'Andrée, pas encore le père de Mathieu, sort en 1985.

    La trouvaille sémantique est de joindre, via le prénom Anne, la citation du conte de Perrault ("Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ?") et la référence à Anne Frank, la "petite fille martyre", auteur du célèbre Journal écrit dans un "placard" d'Amsterdam.

    Chedid ne mâche pas ses mots. Traumatisé par ce succès croissant du FN, il invoque une "nazi-nastalgie" qui ferait hurler, aujourd'hui, les artisans et adeptes de la "dédiabolisation"... Inutile de se leurrer, sa cible est évidente : "Elle a pignon sur rue, des adeptes, un parti...". Cependant, alors qu'aujourd'hui une Marine Le Pen menace de porter plainte contre quiconque qualifierait le FN de parti d'extrême droite, personne n'a cillé. Chedid a évité tout procès en se gardant tout simplement de nommer le Front National. Celui-ci eût été mal inspiré d'avouer qu'il s'était reconnu...

    Louis Chedid ne se contente pas de polémiquer, multipliant les allusions au IIIe Reich ("Croix gammées, bottes à clous, et toute la panoplie..."), il s'attaque aussi clairement à l'attitude irresponsable des médias qui, pour faire de l'audience, ont alors tendu la courte échelle à la formation lepéniste en invitant son leader et en lui donnant largement la parole ("Beaucoup trop d'indulgence et de bonnes manières!"). Chanson datée donc, inséparable de son contexte, et pourtant tellement actuelle sur le fond.

     

    Paroles

    Anne, ma sœur Anne,

    Si j’ te disais c’ que j’ vois v’nir,
    Anne, ma sœur Anne,
    J’arrive pas à y croire, c’est comme un cauchemar...
    Sale cafard!

    Anne, ma sœur Anne,
    En écrivant ton journal du fond d’ ton placard,
    Anne, ma sœur Anne,
    Tu pensais qu’on n’oublierait jamais, mais...
    Mauvaise mémoire!

    Elle ressort de sa tanière, la nazi-nostalgie:
    Croix gammée, bottes à clous, et toute la panoplie.
    Elle a pignon sur rue, des adeptes, un parti...
    La voilà revenue, l’historique hystérie!

    Anne, ma sœur Anne,
    Si j’ te disais c’ que j’entends,
    Anne, ma sœur Anne,

     

    Les mêmes discours, les mêmes slogans,
    Les mêmes aboiements!

    Anne, ma sœur Anne,
    J’aurais tant voulu te dire, p’tite fille martyre:
    "Anne, ma sœur Anne,
    Tu peux dormir tranquille, elle reviendra plus,
    La vermine!"

    Mais beaucoup d’indifférence, de patience malvenue
    Pour ces anciens damnés, au goût de déjà-vu,
    Beaucoup trop d’indulgence, trop de bonnes manières
    Pour cette nazi-nostalgie qui ressort de sa tanière... comme hier!

    Anne, ma sœur Anne,
    Si j’ te disais c’ que j’ vois v’nir,
    Anne, ma sœur Anne,
    J’arrive pas à y croire, c’est comme un cauchemar...
    Sale cafard!
     




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  • QUOI

    Jane Birkin  (1985)

    Chansong 100

    Pour ce N°100, il fallait quelque chose de parfait, c'est-à-dire en outre qui se passerait bien de commentaire. Je serai donc bref, inutile d'épiloguer sur la voix de Jane Birkin, alors au sommet de sa pureté (elle avait cessé de fumer quelque temps auparavant), sur son potentiel inégalé d'émotion.

    Je venais de passer un an avec elle pour préparer le livre sur elle qui sortit le même année que ce sublime 45 tours. La chanson a une histoire. Jane était allée en Italie, tourner pour la RAI une émission de variétés, pour laquelle on lui demanda d'interpréter cette chanson italienne dont elle s'éprit immédiatement, à juste titre. Elle la ramena dans ses bagages avec la ferme intention d'en chanter une version française. Ne manquait que des paroles dans notre langue.

    Pour cela, il lui suffisait d'aller voir Serge (Gainsbourg), dont elle était séparée depuis cinq ans - le temps de l'apaisement. Et voilà que notre auteur, à la hauteur de sa réputation, lui cisèle un texte bouleversant, où il est permis de déceler tous les sous-entendus personnels possibles, mais à travers une universalité tout aussi incontestable. Difficile, impossible, de ne pas avoir la gorge serrée en l'écoutant, aujourd'hui encore. Le "flux lacrymal", comme eût fit Brassens, ne fit pas seulement la quinzaine... 

     

    Paroles

    Quoi 

    D'notre amour fou n'resterait que des cendres 
    Moi
    J'aim'rais qu´la terre s'arrête pour descendre 
    toi 
    Tu m'dis qu tu n'vaux pas la corde pour te pendre 
    C't à laisser ou à prendre 
    Joie 
    Et douleur c'est ce que l´amour engendre 
    Sois 
    au-mois conscient que mon cœur peut se fendre 
    Soit 
    dit en passant j'ai beaucoup à apprendre 
    Si j'ai bien su te comprendre 

    Amour cruel
    Comme un duel 
    Dos à dos et sans merci 
    Tu as le choix des armes 
    Ou celui des larmes 

     


    Penses-y 
    Penses-y 
    Et conçois que c´est à la mort à la vie 

    Quoi 
    D'notre amour fou n'resterait que des cendres 
    Moi 
    J'aimerais qu´la terre s'arrête pour descendre 
    Toi 
    Tu préfères mourir que de te rendre 
    Va donc savoir va comprendre 

    Amour cruel 
    Comme un duel 
    Dos à dos et sans merci 
    Tu as le choix des armes 
    Ou celui des larmes 
    Penses-y 
    Penses-y 
    Et conçois que c´est à la mort à la vie 

    Toi 
    Tu préfères mourir que de te rendre 
    Va donc savoir va comprendre 
    Va savoir va comprendre 

    Quoi 
    D'notre amour feu n'resterait que des cendres 
    Moi 
    J'aim'rais qu´la terre s'arrête pour descendre 
    toi 
    Tu m'dis qu tu n'vaux pas la corde pour te pendre 
    C't à laisser ou à prendre  

     


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