• ATHALIE-ROCK

    Henri Salvador  (1961)

    Chansong 90

    Le texte est de Jean Racine (ATHALIE, Acte II, Scène 5) et c'est devenu un des quatre "Classic Rocks" de ce 45 tours d'Henri Salvador, sorti précisément quand je faisais mes études secondaires, et c'était un excellent alibi auprès de mes parents pour me procurer le disque, où le chanteur arborait une toge digne des matinées scolaires du théâtre local.

    N'empêche que je connais encore par coeur, grâce à Salvador, ces quatre tirades extraites des pièces classiques du XVIIe. Auprès d'ATHALIE, il y avait LE CID, HORACE, CINNA (un Racine pour trois Corneille), quant à la mise en musique c'est plutôt du blues-rock. La drôlerie vient ici, outre de l'interprétation désopilante de Salvador, des choeurs habilement répartis, des répétitions ("ma mère Jezabel-bel-bel"), des calembours ("cet éclat emprunté... combien ?"), des références à cette musique noire américaine ("La cruel Dieu des juifs l'emporte aussi sur toi, baby!") et jusqu'à cet apothéose apocryphe dont n'eût pas rêvé Jean Racine, bien sûr absente du texte d'origine ci-dessous : "Ma mère était un gueuleton pour les toutous!"). Que pourrait-on ajouter à ça ?

     

    Paroles

    C'était pendant l'horreur d'une profonde nuit.
    Ma mère Jézabel devant moi s'est montrée,
    Comme au jour de sa mort pompeusement parée.
    Ses malheurs n'avaient point abattu sa fierté ;
    Même elle avait encor cet éclat emprunté
    Dont elle eut soin de peindre et d'orner son visage,
    Pour réparer des ans l'irréparable outrage.
    « Tremble, m'a-t-elle dit, fille digne de moi.
    Le cruel Dieu des Juifs l'emporte aussi sur toi.
    Je te plains de tomber dans ses mains redoutables,
    Ma fille. » En achevant ces mots épouvantables,
    Son ombre vers mon lit a paru se baisser ;
    Et moi, je lui tendais les mains pour l'embrasser.

    Dans le temple des Juifs un instinct m'a poussée

    Mais je n'ai plus trouvé qu'un horrible mélange
    D'os et de chairs meurtris et traînés dans la fange,
    Des lambeaux pleins de sang et des membres affreux
    Que des chiens dévorants se disputaient entre eux.

    Ma mère était en train de se faire dévorer


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  • YOU TALK TOO MUCH

    Joe Jones   (1960)

    Chansong 89

    Chers amis, voici la pochette (un peu défraîchie) du premier 45 tours que j'aie acheté (5 N.F. !). Nous étions en été 1961, mais le disque est sorti l'année précédente avec un succès foudroyant et mondial. Joe Jones (1911-1985) était un jazzman noir, un batteur réputé et très populaire, dont c'est apparemment le seul essai (mais coup de maître) dans le domaine des "variétés". Le titre de la face B est une bluette, I LOVE YOU STILL, de la pure guimauve, qu'on se forçait à écouter quand même de temps en temps, par politesse. Mais l'énorme tube (le premier de ma vie, assurément) était YOU TALK TOO MUCH, que j'ai sûrement passé et repassé des centaines de fois sur le vieux pick-up familial. Les oreilles maternelles avaient fini par s'y accoutumer, et même par approuver la ritournelle...

    Sa popularité avait été renforcée par la floraison incroyable de sa version française, intitulée évidemment TU PARLES TROP. Je me souviens qu'à l'époque on en avait dénombré onze interprétations. La plus célèbre était celle des Chaussettes Noires, sortie en janvier 1961. Mais il y avait aussi celles de Richard Anthony, Johnny Hallyday, Frankie Jordan, mais encore Dalida et Dario Moreno !   En guise de traduction des paroles originales, je vous copie celles de cette v.f., signées Georges Aber.

    Alors, chanson misogyne, cette mise en boîte d'un incessant bavardage féminin ?  Pas plus, sans doute, que le HIT THE ROAD, JACK de Ray Charles qui s'attardait lui sur la jalousie conjugale... Tout ça, c'est de l'humour.

     

    Paroles

    You talk too much
    You worry me to death
    You talk too much
    You even worry my pet

    You just talk
    Talk too much

    You talk about people
    That you don't know
    You talk about people
    Wherever you go

    You just talk
    Talk too much

    You talk about people
    That you've never seen
    You talk about people
    You can make me scream

    You just talk
    You talk too much

    You talk too much


    You worry me to death
    You talk too much
    You even worry my pet

    You just talk
    Talk too much

    You talk about people
    That you don't know
    You talk about people
    Wherever you go

    You just talk
    Talk too much

    You talk about people
    That you've never seen
    You talk about people
    You can make me scream

    You just talk
    You talk too much

     

    Tu parles trop, j'entends du soir au matin
    Les mêmes mots, toujours les mêmes refrains
    Tu fais:" Bla bla bla bla "
    C'est ton défaut
    Tu parles à tort des gens que tu n' connais pas
    Tu dis bien fort ce que l'on pense tout bas
    Tu fais:" Bla bla bla bla "
    C'est ton défaut
    Tu parles à tort, si la parole est d'argent
    J'aurai bientôt fait fortune en t'écoutant
    Tu fais:" Bla bla bla bla "
    C'est ton défaut
    Oui, Tu parles trop avec toi mon percepteur
    De mon magot, connaît le chiffre par cœur
    Tu fais:" Bla bla bla bla "
    C'est ton défaut
    Tu parles à tort tu ne comprends jamais rien
    Tu parles à tort, malgré ça je t'aime bien
    Tu fais:" Bla bla bla bla "
    C'est ton défaut
    Tu parles trop mais quand il s'agit d'amour
    Rien n'est plus beau, tu peux parler nuit et jour
    Oui, oui, haaaa!
    C'est jamais trop! Non jamais trop!

     


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  • POURQUOI UN PYJAMA

    Régine  (1966)

     

    Chansong 88

    Dans les euphoriques années 60, on pouvait sortir sans sourciller une chanson comme celle-ci, qui n'est qu'un énorme gag. Je ne vais pas vous faire un cours magistral sur le thème du pyjama dans la chanson française humoristique. On a sans doute commencé en 1930 avec C'EST POUR MON PAPA, de l'inoubliable Milton ("Les vieux pyjamas, c'est pour mon papa / les dessous troublants, c'est pour ma maman"...)

    Au-delà d'un texte assez rudimentaire, loin des tours de force linguistiques dont il était coutumier, Serge Gainsbourg s'offre surtout un immense pied de nez à l'esprit de sérieux en accolant la voix de gavroche parisien de Régine à celle d'une chanteuse d'opéra dont les vocalises éthérées contrastent évidemment avec la trivialité du thème, créant un effet de drôlerie irrésistible.

    Je note que sur les sites actuels des internautes se demandent à qui est cette  voix insensée de "coloratur"... Ayant vécu l'époque en question, je suis en mesure de leur révéler qu'il s'agit d'une deuxième Régine : la très prestigieuse et décorée Régine Crespin (1927-2007) qui a donc accepté avec humour de jouer le jeu gainsbourgien de l'irrespect et de l'impertinence. Qu'elle en soit remerciée !

     

    Paroles

    Pourquoi un pyjama
    À rayures, à fleurs ou à pois ?
    Pourquoi un pyjama
    En coton, en fil ou en soie ?

    Moi, je n'en mets jamais
    Non jamais, je n'en mets
    Jamais je n'ai mis de ma vie, un pyjama
    De même, aucun de mes amis
    N'en a aucun, jamais de mes amis
    N'a mis un pyjama

    Pourquoi un pyjama 
    À rayures, à fleurs ou à pois ?
    Pourquoi un pyjama 
    En coton, en fil ou en soie ?

    À quoi bon s'habiller
    Quand on vient de se déshabiller
    Il n'y a pas d'raison de s'arrêter
    On passerait sa vie et ses nuits à s'habiller
    S'habiller, se déshabiller, se rhabiller

    Pourquoi un pyjama 
    À rayures, à fleurs ou à pois ?
    Pourquoi un pyjama 
    En coton, en fil ou en soie ?


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  • JE M'AIME

    Shitty   (1980)

    Chansong 87

    C'est toujours l'été, les "vacances" dit-on, et j'en profite pour récidiver dans la curioité amusante. J'ai toujours précieusement conservé ce 45 tours de Shitty, membre de l'inoubliable groupe ODEURS, dont le JE M'AIME figure aussi sur un 30 cm. de celui-ci.

    Inutile d'épiloguer sur ce titre assez grandiose dans le second degré qui lui/leur était propre, et j'avoue que pour une fois je n'ai trouvé nulle part les paroles sur le Net (tiens ! ne valent-elles pas la peine d'être immortalisées ?).

    C'est un moindre mal car on n'a, bien sûr, aucune peine à les comprendre et il n'y a ici aucune ambiguïté ni complexité particulières... Et le seul commentaire qu'on puisse adjoindre à ce morceau ne peut être que : Sacré Shitty !


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  • THE FALL OF SAIGON

    Elliott Murphy  (1982)

    Chansong 86

    Je m'étonne moi-même d'avoir autant attendu pour publier un titre d'Elliott Murphy, découvert en 1973 avec son premier album, AQUASHOW. Cet Américain voyageur, figurant dans FELLINI-ROMA, s'est établi un moment à Paris (où il vit peut-être encore ?) et j'ai assisté dans les années 2000 à un de ses concerts au New Morning, juste à côté de chez moi.

    Quelque part entre Dylan et Bowie, en restant très approximatif, avec une une belle voix envoûtante et un son très particulier, Murphy est un chanteur à textes. Pour ce morceau sur "la chute de Saïgon", extrait de son album MURPH THE SURF, j'ai eu un mal fou à trouver les paroles, et je vous les livre sans traduction (le site étant italien, celle-ci était italienne).

    A vous de jouer donc, de démêler le réel du fantasme dans cette évocation de l'affolement et du chaos qui ont marqué cette défaite militaire, avec le ballet des hélicoptères qu'on a pu voir au cinéma, et dont le vrombissement vient ici en forme de finale. La guerre (du Viet-Nam) qui se termine, et en parallèle la fin d'un amour, le tout avec une "énergie" rare - bien que je n'aime pas le terme, mais cette fois je n'en trouve pas d'autre...

     

    Paroles

    Captain they're calling they don't want us falling behind
    There's no use in stalling there's no use in drawing a line
    Let's get out of this rice paddy before I step onto some god damn mine
    And we'll take a jeep and watch the fall of Saigon

    And hey girl its over
    Goodbye white cliffs of Dover
    Sail onto free lands
    The boys all come home

    Call girls are crying as helicopters fly their loves away
    There's a panic at the embassy a blood bath is coming they all say
    And what's come between us I try but I just can't get it on
    Love has turned to politics - like the fall of Saigon

    And darling I'm lying you're right I'm just sick of trying
    This romance is ending
    That feeling is gone

    You got your mystery and I got what's left of this song
    And just like southeast Asia I don't know if I'm right or if I'm wrong
    Some things are worth fighting for and some things well they're just gone
    But I remember the night we watched the fall of Saigon

    And darling I'm lying you're right I'm just sick of trying
    This romance is ending
    That feeling is gone


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  • J'AI 26 ANS   

    Brigitte Fontaine  (1970)

    Chansong 85

    Je me rends compte que je n'avais pas encore évoqué Brigitte Fontaine sur ce blog. Et pourtant !  Occasion d'un flash-back, de l'extravagante diva d'aujourd'hui retournons à la jeune chanteuse prometteuse de l'écurie Saravah.

    Elle fut toujours coutumière de la provocation, mais je choisis plutôt cet autoportrait original et pointu, légèrement décalé sans doute (elle avait en fait 31 ans à l'époque), où la voix sonne clair, pas du tout gênée par une orchestration minimale. C'est extrait de l'album COMME A LA RADIO qui contient aussi l'exceptionnel LETTRE A M.LE CHEF DE GARDE DE LA TOUR DE CAROL.

    Chacun pourra évidemment s'amuser à comparer ses propres goûts et caractéristiques avec ceux et celles de B.F.  Pour ma part, je dirai surtout que je n'aime pas les bananes très mûres, bien au contraire !  Mais que serait-ce si on partageait tout de ce que disent les chansons ?

     

    Paroles

    J’ai vingt-six ans 
    Mais seulement quatre d’utiles 
    Je ne comprends rien à rien 
    J’ai peur des papillons 
    Mon père est mort à la guerre
    Quand j’étais petite j’avais un gilet
    En angora rose
    Qui s’arrêtait avant les côtes flottantes
    Les vieux messieurs
    M’aimaient beaucoup
    Je ne crois pas à l’expérience
    Je me méfie des endroits clos
    Je ressens la paresse comme une maladie
    J’aime les rivières jaunes
    Il faut te dire que j’ai derrière l’oreille
    Un coin de peau extraordinairement doux
    Que j’aime les laitages et les bananes très mûres
    Je souhaite toujours que le dragon m’emporte c’est pourquoi je me suis attachée sur ce fauteuil avec des sangles de vélo
    J’aime toutes les histoires qui commencent par « Il était une fois »
    Je hais le café au lait
    Avant les garçons me frottaient toujours les oreilles
    Une fois j’ai vu des chars blindés sur l’avenue d’Orléans
    J’aime les rengaines d’amour
     Et les frites me font pleurer

    Sur l’eau, les bateaux me suivent toujours
    Ils me font peur, ils me font peur
     J’ai vécu très longtemps ici ou là, chez des amis

    Un jour j’ai cassé une table en marbre
    J’aime les hommes pas rasés
    J’ai souvent mal aux dents
    J’ai faim quand il ne faut pas
    Voilà tu sais tout


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  • LA PETITE

    Maurice Biraud & France Gall   (1967)

    Chansong 84

     

    Profitons de cet été pour miser sur la légèreté. L'inoubliable duo Biraud-Gall ressemble à ces boissons dont on dit qu'elles se boivent sans soif. Désolé pour la qualité sonore, loin d'être irréprochable : la chanson est rarissime, l'enregistrement que je vous propose provient d'une émission de Groucho et Chico sur 95.2, "Montparnasse Graffiti".

    Est-elle si innocente, cette histoire de l'ado (délurée) et de l'ami (ému) de son père ? Ne faut-il pas la classer parmi celles dont on dit pudiquement qu'on ne pourrait plus les enregistrer aujourd'hui ?  Sous-entendu, après que tant d'affaires dites de "pédophilie" ont défrayé la chronique ?  Car le temps sont durs, et peut-être tout simplement que nous avons perdu cette belle innocence...

     

    PS- Corrigeons ce que je dis plus haut : grâce à Zozef Marin, j'ai pu remplacer mon vieil enregistrement par un mp3 impeccable de LA PETITE. Merci Zozef !

     

    Paroles

     

    MB - Comment ne pas s'attendrir devant la petite

    Devant ses yeux innocents, devant son sourire
    Elle change depuis quelques temps, elle pousse la petite
    Déjà femme mais pourtant ce n'est qu'une enfant

    FG - Une enfant ! On a tout vu, qu'est-ce qu'il faut
    entendre !
    Quand je pense qu'on a failli hier te surprendre
    Essayant de m'embrasser, moi me laissant faire
    Il n'est pas si mal l'ami, l'ami de mon père

    [Refrain] :
    Duo - Un jour les oisillons prennent leur envol
    Les petits deviennent grands il n'y a plus d'enfants !
    Un jour les oisillons prennent leur envol
    Les petits deviennent grands il n'y a plus d'enfants !

    MB - Elle est fragile comme une fleur si douce la petite
    Quand je pense qu'un homme pourrait lui briser le coeur
    De sa candeur profiter, toucher la petite
    J'ai bien envie malgré moi de la protéger

    FG - Me protéger ! Allons bon ! v'là qu'il recommence
    Avec un prof comme toi j'aurais de la chance
    J'apprendrais évidemment mille choses à faire
    Il est futé croyez-moi, l'ami de mon père

    [Refrain]

    MB - Comment ne pas s'attendrir devant la petite
    FG - Devant tes yeux innocents devant ton sourire
    MB - Elle change depuis quelques temps, elle pousse la
    petite
    FG - Toi tel que je te connais tu n'changeras jamais


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