-
Chansong 09
LA LICORNE APPAREILLE
Alain Chamfort (1983)
Alain Chamfort ? Oui. Parce qu'il est un des plus sous-estimés, malgré son compagnonnage avec Gainsbourg, dans le domaine de notre "chanson d'auteur". J'ai sélectionné LA LICORNE APPAREILLE comme une évidence, car c'est depuis longtemps un de mes tubes personnels. La lancinante et incantatoire mélopée enveloppe ici un texte surréalisant, qu'il est sans doute vain de vouloir commenter ou analyser, mais que je vous conseille simplement d'écouter attentivement, afin d'en bien goûter toute la virtuosité de la jonglerie des mots.
Car elle en vaut la peine, cette improbable histoire de deux jeunes vierges qui, enlevées par des pirates, réussissent à "retourner l'équipage" en exhibant leurs charmes, et prennent le pouvoir à bord, sacrifiant à toutes les jouissances interdites, des débordements érotiques à l'accaparement des trésors dérobés.
D'Hergé à Brassens, Anémone et Mireille sont des héroïnes selon notre coeur, sans oublier Emile, et Hector, et cette bande de joyeux pirates leur faisant subir les ultimes outrages qu'elles réclament à grands cris.
Anecdote amusante : les versions écrites circulant sur le Net sont truffées de fautes que j'ai dû corriger. Il faut croire que la poésie de Chamfort en a dérouté plus d'un.
Paroles
Quand Anémone dit à Mireille
la Licorne appareille
leurs altesses pucelles et nubiles
arrachées d'un duché
atterrées d'être enchaînées
de corsaires
otages amères et mises aux fers
seulettes dignes et soumises
excitantes infantesen danger vers Tanger...
Quand Anémone dit à Mireille
la Licorne appareille
aux cales les geôliers enjôlés
jupons volent
volent au pont
leurs appas au vent d'avril
d'un strip-tease
les otages retournent l'équipage
infante en fait très au fait
excitantes
tentent à Tantale Bretons en nage...
Assimile, Emile
assimile, Emile
pour six mille écus
seul un roi nous vit nues...
À ces nuits d'idylle
à ces nuits d'idylle
allez c'est promis
vous nous aurez aussi
Quand Anémone dit à Mireille:
la Licorne, appareille
ces capitaines qu'on dit sauvages
quotidiennes
au carnage
adorées soyez nos reines
leur dit-on
que vos petits tétons nous mènent
pillons à fond les sept mers
légendaires
Et piquons l'or et ses mystères...
Comptez l'or, Hector
comptez l'or, Hector
les copains d'accord
mais d'abord passe l'or...
À ces nuits d'idylle
à ces nuits d'idylle
allez comme promis
vous nous avez aussi...
[Parlé]
Les grimoires chuchotent
qu'au faîte de la gloire
ces deux matelotes
un beau soir dirent adieu...
On les dit aussi
sodomites aux îles
pochardes aux Barbades
où sont-elle passées ?
ça, nul ne le sait
Si reines de corsaires,
sirènes des mers,
l'alizé d'été les entend chanter
À cette île, Emile
à cette île, Emile
les copains d'accord
mais d'abord passe l'or...
Comptons l'or encore
comptons l'or encore
plongeons-y nos corps
mais les copains d'abord
-
Commentaires
Bernard, je comprends ta perfide allusion... Mais ce qui est vain peut être malgré tout plaisant. J'assume la contradiction !
Ajouter un commentaire
Alain Chamfort. Surprise. Je n'avais même jamais entendu ce nom-là, inculturé musical que je suis! En tout cas, Gérard, c'est une bonne idée de mettre les paroles, car à l'écoute on n'y comprend pas grand chose. (Et même, avec les mots, c'est pas évident...) Et tu as aussi bien raison de dire qu'il est vain de prétendre analyser ce genre de texte. C'est comme "Jeanne" de Manset, entre autres...